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© Christophe Raynaud de Lage

Aziz. Tantôt narrateur, tantôt personnage, il raconte sa vie et ses rencontres. La révolte tout d’abord. Celle des Kabyles en 1871 pour laquelle il s’est engagé, menée par El Mokrani et son père, le Cheikh El Haddad de la confrérie Rahmaniya, qui refusent le joug colonial français. Celle de la Commune en 1870, de ces hommes et ces femmes qui ont refusé de capituler face aux Prussiens aux portes de Paris, et face au pouvoir et à son régime. Celle des Kanaks en 1878, là encore contre l’impérialisme français qui s’accapare les terres ancestrales de Nouvelle Calédonie. L’exil ensuite, sur « Le caillou », cette terre calédonienne où nombre de Communards et de Kabyles (qui la nommeront Kaldûn) ont été déportés dans les mêmes bateaux et où est née, à fond de cale, une réelle fraternité.
C’est tout cela, et bien plus encore, que raconte Kaldûn, une pièce de théâtre musical jouée ce mois au Théâtre des quartiers d’Ivry.

« Nous glissons d’un continent à l’autre et nous en parlons les langues pour mieux comprendre trois révoltes, peu connues en réalité, situées dans l’angle mort de l’Histoire, explique Abdelwaheb Sefsaf, son auteur et metteur en scène, directeur du Théâtre de Sartrouville et des Yvelines-Centre dramatique national. Nous sondons ces histoires de luttes et de combats pour la dignité humaine, ces révolutions qui fondent, aujourd’hui encore, le socle de notre identité. »

Intime et politique

Parmi les rencontres d’Aziz, il y a la militante anarchiste Louise Michel ; Bou Mezrag El Mokrani, frère du leader de l’insurrection kabyle. Ou encore Ataï, un grand chef kanak qui incarne l’âme de la révolte de 1878, et dont la tête sera exhibée à l’Exposition universelle de Paris... « Ces destins m’ont profondément touché. On a non seulement privé tous ces gens d’une vie, mais aussi d’une mort, d’une légitime sépulture. Ce qui m’intéresse là, c’est de réparer les traumatismes dont souffre notre société, raconter ces histoires afin d’apaiser les mémoires. »

Sur scène, un plancher à la dérive comme un pont de bateau évoque la longue traversée des insurgés vers leur exil lointain. Musiciens, comédiens, chanteurs, danseur et vidéaste proposent un travail de composition originale avec des chants et musiques arabo-andalouses, kurdes, arméniennes, maronites, syriaques, soufies, kanaks. Sans oublier le répertoire révolutionnaire parisien du XIXe siècle. Kaldûn, un récit à la fois épique, intime et politique, revisite des pages méconnues de notre histoire. Et la musique, une fois encore, traverse les hémisphères pour créer un horizon commun.

Ahmed Talbi

Kaldûn : une création de la compagnie Nomade in France et de l’ensemble de musiques anciennes Canticum Novum, du 23 au 26 novembre au Théâtre des quartiers d’Ivry, à la Manufacture des Œillets, 1 place Pierre Gosnat. 01 43 90 11 11.

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Kaldûn - Teaser from Théâtre de Sartrouville-CDN on Vimeo.

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