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Merlot propose une forme hybride proche du ciné-concert avec ses compères musiciens Cedrick Santens et Thibaut Brandalise. © Thomas Lepage

À l’écran, une bouille, fendue d’un sourire sur lequel la petite souris est passée et repassée. Après une brève timidité, une pomme croquée à la main, l’enfant entonne un chant d’une voix rigolarde et éraillée. La phrase musicale reprend, en boucle, tandis que commence à l’accompagner une musique mi-organique mi-électronique aux origines non contrôlées.  « C’est lui, le petit Giovanni, qui m’a donné l’idée et l’envie de monter de cette façon Nouveaux voisins », raconte Merlot.

Le musicien ivryen est allé à la rencontre des habitants du Centre d’hébergement d’urgence pour migrants (Chum) situé sur le site de l’ancienne usine des eaux. Au départ, à l’instigation de l’Académie Charles Cros, il était prévu qu’il y donne des ateliers d’écriture de chanson française de septembre 2018 à mars 2019. « D’expérience, je savais que ce serait difficile à faire, voire gênant de demander comme ça de venir écrire une petite chanson, estime Merlot. Je ne voulais pas faire comme si je venais au zoo. J’ai compris qu’il fallait avant tout que je me présente. » Il donne donc un concert dans ce centre géré par Emmaüs Solidarité et financé par Paris et l’État. Unique en Europe, le Chum héberge 432 demandeurs d'asile. Des femmes isolées, familles avec enfants (182 mineurs) et couples de réfugiés qui ont fui des pays en guerre ou à la situation politique critique.

Pas intrusif

« Ma collègue Marion et moi avons introduit Merlot auprès des familles et des enfants afin qu’il soit bien identifié, raconte Jean-Didier Prignol, animateur socio-culturel du Chum. Le tout est de ne pas être intrusif, notamment sur le parcours des familles, au risque de réactiver des souvenirs très douloureux. Merlot a été très attentif à cela et a fait preuve d’une retenue et d’une humilité assez exceptionnelles. » Le chanteur décide donc de rencontrer petit à petit les habitants du centre. Ce sont les enfants, comme Giovanni, qui font vite office de passeurs. « On a fait ainsi connaissance, d’individu à individu. Je demandais juste à ce qu’on me chante une chanson et que je puisse filmer », explique Merlot qui s’avoue encore très touché de ces échanges. Autant de samples (une vingtaine) sur lesquels il a posé de la musique en compagnie de deux comparses. Une monteuse est venue harmoniser les petits films. Et c’est ainsi que Nouveaux voisins s’est constitué.  «L’idée, c’était de m’adresser aux Ivryens, aux Français et aux Européens pour qu’ils voient tous ces gens comme leurs voisins, souligne-t-il. De mon côté, cela me permettait aussi de me mettre un peu en retrait du devant de la scène et de proposer une sorte de ciné-concert. »

Et pour les habitants du Chum, qui ont pour la plupart quitté celui-ci depuis cette expérience ? « Tout l’enjeu du Chum est de favoriser une bonne intégration de ces familles migrantes et cela passe aussi par le sport ou la culture »,  souligne Bruno Morel, directeur général d’Emmaüs Solidarité. L’animateur Jean-Didier Prignol renchérit : « Avec la culture, c’est l’estime de chacun qui remonte. Elle permet de renouer une capacité de contact avec le monde, avec le beau, et ce sans aucune obligation ».  Une ouverture aux autres avec lesquels on est enchanté de faire connaissance.

Thomas Portier

Nouveaux voisins : le 19 septembre à 16h au théâtre Antoine Vitez : 1 rue Simon Dereure.
Tél : 01 46 70 21 55. Entrée libre sur réservation.

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