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Renée Gailhoustet sur sa terrasse de la cité du Liégat qu’elle avait conçue et où elle vivait depuis les années 80. Crédit : Raphael Chipault.

« C’était un rêve du mouvement moderne, inspiré par « Corbu », d’avoir un logement en ville avec les avantages de la campagne. » Lors de notre dernière entrevue pour le magazine Ivry ma ville, en 2017, l’architecte ivryenne Renée Gailhoustet avait évoqué en souriant Le Corbusier*, le père fondateur du mouvement moderne qu’elle admirait. 

Ce 4 janvier, à l’âge de 93 ans, cette femme, qui défendait un urbanisme humaniste, est décédée dans son logement de la cité du Liégat, située rue Gabriel Péri, qu’elle avait conçue et où elle vivait. Un immeuble de 136 appartements avec des terrasses plantées mais aussi des ateliers et des commerces. Un hommage lui a été rendu le 8 janvier par les habitants du centre-ville dans la cité du Liégat. Ses obsèques ont eu lieu le 9 janvier, au cimetière parisien d’Ivry (44 avenue de Verdun).

Née en 1929 à Oran, Renée Gailhoustet avait rejoint Paris pour suivre des études de philosophie, puis d’architecture. Militante communiste, elle s’était passionnée pour un sujet peu reconnu : le logement social, tout comme son compagnon Jean Renaudie qui a réalisé les « étoiles » d’Ivry.  De la fin des années 60 aux années 80, elle avait été chargée par la municipalité de la rénovation du centre-ville. Elle en avait notamment dessiné les quatre tours. 

« La première, Raspail, est la plus réussie car les logements sont en semi-duplex. Après l’entrée, il y a sept marches, puis le séjour et la cuisine, puis sept marches pour accéder aux chambres. On obtient ainsi une belle lumière dans les appartements. Les semi-duplex, c’était une nouveauté à Ivry mais aussi en France ! Rien à voir avec l’uniformité des logements au sein des grands ensembles de l’époque. » [Interview du magazine Ivry ma ville, avril 2015.]

Une pionnière

En 1972, elle avait aussi réalisé la cité Spinoza qui s’inscrit le plus dans la filiation « Corbu », avec la surélévation du bâtiment par des portiques en béton et la présence d’équipements collectifs (crèche, centre médico-psycho-pédagogique…). En dehors d’Ivry, elle est aussi l’autrice du fameux quartier de la Maladrerie à Aubervilliers et de l’îlot 8 à Saint-Denis.

« Il est vital que le logement par ses volumes, son agencement… soit aussi varié que possible pour que chaque individu trouve la coquille qui convienne, même en HLM », nous avait-elle confié en 2015. 

Son architecture d’une grande diversité formelle avait été récemment saluée au niveau national et international. En 2022, elle avait reçu le Grand Prix d’Honneur du ministère de la Culture. Une distinction qui avait été précédée par la médaille d’honneur de l’Académie d’Architecture en 2018, le prestigieux Grand Prix d’Art de Berlin et le non moins prestigieux Prix de l’Architecture de la Royal Academy of Arts de Londres. 

Renée Gailhoustet avait enfin été l’une des rares femmes de sa génération à s’imposer dans le milieu de l’architecture et a signé une œuvre aussi remarquable. C’était une pionnière à plus d’un titre.

Catherine Mercadier

*Le Corbusier, architecte français (1887-1965), auteur de la Cité radieuse à Marseille. 
 

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