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Vu des Vortex de Louidgi Beltrame. © Mairie d'Ivry-sur-Seine - Michaêl Lumbroso

Dans le désert nord-péruvien balayé par les vents, deux hommes sondent le sol rocailleux avec une étrange tige en métal, longue et fine. Avec cette « baqueta », fabriqué par des ferrailleurs locaux, ces deux huaqueros - « fouilleurs de tombes clandestins » - sont à la recherche de huacas. Ces sépultures précolombiennes sont des sites sacrés considérés comme vivants. Pour les trouver, il faut entrer en relation avec l’esprit du mort, à qui l’on va faire des offrandes tout au long de l’excavation. « On dit que la huaca pleure quand des larmes de sable commencent à couler. Cela veut dire que la tombe menace de s’écrouler », explique Louidgi Beltrame.

Les artefacts extraits sont ensuite vendus à des intermédiaires ou offert aux chamanes locaux qui « nettoient » les huaqueros, permettant ainsi à ces vestiges ancestraux de retourner à leur usage rituel. Une archéologie empirique, juridiquement illégale mais tolérée par les communautés locales auxquelles appartiennent les huaqueros, véritables intermédiaires entre le monde des vivants et celui des morts. Ce sont les différentes étapes de cette pratique rituelle ancienne que Louidgi Beltrame donne à voir dans plusieurs vidéos diffusées dans la grande salle du Crédac. Au milieu y trône une sculpture en aluminium réalisée à partir d’un scan 3D d’une tombe ouverte.

Vortex

Lui-même à la croisée de l’archéologie, de l’architecture et de l’anthropologie, l’artiste présente dans une autre salle plusieurs photos argentiques montrant un ensemble de pétroglyphes (dessins symboliques) antiques gravés sur des roches du site de Huancor, au sud des Andes péruviennes. Des oiseaux, mammifères et humains qui n’apparaissent qu’au moment où la lumière du jour affleure sur les roches.

Dans la salle adjacente sont exposés huit « vortex » (tourbillon creux), des encres sur toile, déclinaisons de traits bleus, roses ou violets autour d’un espace circulaire resté vierge. L’effet d’optique rappelle les trous creusés par les huaqueros. Et l’on se sent comme attiré par le centre de ces « peintures de méditation », comme les qualifie Louidgi Beltrame, qui les a réalisées pendant qu’il préparait l’exposition. Enfin, la dernière salle nous fait entendre les récits de Terreco, Oscar, Marlon et José Luis. Ces quatre huaqueros expliquent comment, à l’aide de feuilles de coca et de… cigarettes, ils arrivent à dénicher les huacas. Et à entrer en connexion avec les esprits. Une expérience définitivement mystique.

Philippe Gril

La Huaca pleure, de Louidgi Beltrame, jusqu’au 31 mars au Crédac : 1 place Pierre Gosnat. 01 49 60 25 06. Credac.fr
23 mars à 16h : La Huaca pleure, mange, enchante. Art et antrhopologie en dialogue. Louidgi Beltrame en conversation avec Emanuela Canghiari.

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