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© Mairie d'Ivry-sur-Seine - Serena Porcher-Carli

Ivry ma ville hebdo : Traditionnellement, le genre humain est soit féminin, soit masculin, alors que la réalité est plus nuancée...

Marie Zafimehy : Depuis des siècles, les êtres humains sont divisés en deux catégories en fonction de leur sexe : les hommes et les femmes. Quant au genre - l’expérience de notre identité et le rôle que nous avons dans la société - il serait défini par notre sexe. Toute une destinée se dessine donc dès qu’un bébé est décrété fille ou garçon. S’il a un zizi, il sera a priori bricoleur et fan de voitures. S’il a une zézette, il sera sage, attentionnée, plutôt bavard ! La démonstration est un peu caricaturale mais permet de comprendre que des rôles nous sont imposés dès la naissance. Ce sont des stéréotypes ! Or, depuis les années 60-70, des sociologues et anthropologues féministes ont démontré que le genre était loin d’être inné. C’est en réalité une construction sociale que Simone de Beauvoir a résumé par sa célèbre phrase : « On ne naît pas femme, on le devient ! ». S’il s’agit d’une invention, pourquoi le genre devrait-il être binaire ?

Ivry ma ville hebdo : Ce changement dans la perception du genre s’accompagne de nouveaux termes qui ne sont pas toujours faciles à appréhender !

Marie Zafimehy : À la différence de l’anglais par exemple, la langue française est hyper genrée, donnant des marques du féminin ou du masculin à chaque nom. Voilà pourquoi le pronom « iel », neutre, a été imaginé. Des mots ont aussi été créés comme « non binaires » pour désigner des personnes dont le genre n’est ni exclusivement féminin, ni exclusivement masculin, à la fois homme et femme ou entre les deux. Les personnes « cisgenres ou cis » ont une identité de genre qui correspond à leur sexe alors que les personnes « transgenres ou trans » ont une identité de genre, c’est-à-dire une expérience intime et personnelle, qui ne coïncide pas avec leur sexe. Ces nouveaux termes ne reflètent pas des réalités nouvelles : les personnes non binaires ont toujours existé !  Nommer ces situations, c’est les reconnaître et se sentir tout simplement mieux. C’est libérateur.  

Ivry ma ville hebdo : Que représente la Journée internationale contre les phobies LGBTQI+ (Lesbienne, Gay, Bi, Trans, Queer, Intersexe, Asexuel ou Aromantique) du 17 mai pour vous ?

Marie Zafimehy : Comme la Journée internationale des droits des femmes du 8 mars, cet événement permet de mettre en lumière les problématiques liées aux identités de genre et à l’orientation sexuelle. Cela permet notamment aux minorités de ne pas se sentir seules et isolées ! En France, la déconstruction du modèle binaire féminin/masculin n’est pas simple comme en témoignent les agressions homophobes ou LGBT-phobes régulières. Il faut du temps et de la pédagogie pour faire bouger les lignes. Avec notre livre conçu comme un guide, nous espérons participer à ce mouvement. L’objectif est que les personnes puissent vivre leurs vies comme elles l’entendent, sans crainte et sans avoir à se cacher… Ce qu’elles ont longtemps fait.

Propos recueillis par Catherine Mercadier

Rencontre autour du genre samedi 21 mai de 14h à 16h à l’Espace Gérard Philipe, Centre Jeanne Hachette (côté rue Raspail).

Bio express
1996 : naissance à Paris XIVe.
2013 : baccalauréat au lycée Albert Camus de Bois-Colombes (Hauts-de-Seine).
2015-2016 : échange Erasmus au département de sciences politiques de l'université d'Uppsala (Suède).
2018 : Master de l'École de journalisme de Sciences-Po Paris, rencontre avec Aline Laurent-Mayard.
2020 : Master en études du genre à l'université de Linköping (Suède).
2021 : publication du livre Le Genre expliqué à celles et ceux qui sont perdu-es, coécrit avec Aline Laurent-Mayard (֤Éditions Buchet/Chastel).
Depuis 2019 : journaliste à RTL.

Ivry s’engage dans la lutte contre les discriminations envers les personnes LGBT+. Plus d’informations ici.

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